Le grand public ne le connaît pas. En
revanche, le patron du très puissant groupe d’intérêts LEEM (les entreprises du médicament),
Christian Lajoux est incontournable dans l’industrie pharmaceutique. Sa
biographie devrait intéresser quand même quelques journalistes, de ceux qui
suivent l’affaire Servier et le scandale du Mediator, mais très curieusement, rien
ou si peu sur l’action très lobbyiste de cette opaque corporation.
Christian
Lajoux a occupé plusieurs fonctions au sein de Sandoz, notamment Directeur
de Division, avant de rejoindre Sanofi Winthrop en
1993. Il a ensuite exercé plusieurs fonctions, notamment celle de Directeur des
Opérations et de Directeur Général de Sanofi Winthrop
France, avant d’être nommé Senior Vice-président France, juste avant la fusion
avec Synthélabo en 1999.Il a occupé cette fonction jusqu’à sa nomination au poste de Senior Vice-président Europe, en janvier 2003, puis à sa fonction actuelle en août 2004. Il est Président du LEEM (les entreprises du médicament) depuis juillet 2006. Depuis 2008, il est Président du Conseil Stratégique France de Sanofi-Aventis.
Christian
Lajoux est également Président de la Fédération Française des Industries de
Santé (Féfis), administrateur de l’Inserm et de l’Afssaps, membre du Haut
Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) et Président de l’IFIS
(Institut de Formation des Industries de Santé). Cerise sur le gâteau, Christian
Lajoux assure la présidence
de Sanofi France. On serait donc en droit de s’interroger sur la
présence du LEEM à l’Assemblée nationale, représentée par Muriel Carroll, responsable
des affaires publiques et sur les actions de lobbying évidentes envers les élus
de la République.
Christian
Lajoux préside donc le LEEM, l’organisation professionnelle qui représente les
entreprises du médicament présentes en France. Cette organisation, selon sa propre
définition, a pour mission «de découvrir,
produire et mettre à disposition des médicaments et vaccins à usage humain. »
Cette organisation professionnelle « qui porte les sujets d’intérêt collectif
de la profession. Son rôle consiste également à élaborer et à faire respecter
l'éthique de la profession, à faciliter les échanges entre ses membres, à
établir et à faire vivre des liens avec les autres professions de santé et avec
les acteurs de la société, à promouvoir des démarches collectives de progrès,
de qualité et de valorisation du secteur. Présidé par Christian Lajoux, le LEEM
fédère près de 270 entreprises adhérentes, qui réalisent plus de 98 % du
chiffre d’affaires total du médicament en France, et emploient plus de
100 000 collaborateurs. »
Le fait que Christian Lajoux assure la présidence de Sanofi France ainsi
que le LEEM ne choque visiblement personne. Cependant en tant que président du
LEEM, Christian Lajoux a promptement réagi lorsque le rapport de l’IGAS fut publié
au mois de janvier 2011 accablant le groupe Servier. Trois jours à peine sa
diffusion, le patron
du LEEM indiquait qu’il « n’était pas inutile que Servier renonce à un certain nombre de postes
importants, comme les présidences de groupe ou la présidence de la commission
économique du LEEM ». Le lâchage d’un des
plus gros contributeurs du LEEM en dit long sur les enjeux de l’affaire
Mediator : « les industriels du médicament
sont très préoccupés par la perte de confiance réelle à l’égard des industriels
et du système de santé. Nous constatons la déflagration et l’anéantissement des
efforts qui ont été faits depuis des années dans la réhabilitation du
médicament dans l’opinion a sobrement » commentait Christian Lajoux à l’occasion des vœux
du LEEM le 31 janvier 2011. A leur tour, les
laboratoires Servier annonçaient leur démission de l’organisation
professionnelle estimant « «injustifiée» leur mise à l'écart du LEEM.
Sur le plan politique, au mois de février 2012, Christian
Lajoux, dressant
le bilan de l’année écoulée, soulignait « sa volonté affichée de maintenir un dialogue permanent avec les
autorités (Xavier Bertrand en particulier, le ministre de la santé), et celle
de préserver l’attractivité et la compétitivité industrielle de la France ». Évidemment, les esprits perfides pourraient aussi se dire que la disparition à
terme des laboratoires Servier laisserait un peu plus de place au géant Sanofi.
Mais bien entendu ce ne serait pas politikement korrekt et personne ne pourrait
le confirmer…